NUCLÉAIRE (MÉDECINE)

NUCLÉAIRE (MÉDECINE)
NUCLÉAIRE (MÉDECINE)

La découverte de la radioactivité artificielle en 1934 par Irène et Frédéric Joliot-Curie a été à l’origine de l’émergence d’une discipline médicale nouvelle, la médecine nucléaire. Cette découverte a conduit à la production des isotopes radioactifs des éléments constituants de la matière vivante et à leur utilisation comme traceurs ; l’élément radioactif est totalement indiscernable de son homologue stable naturel, sauf pour l’une de ses propriétés: il est capable de manifester sa présence dans l’ensemble des atomes par un rayonnement électromagnétique ou particulaire émis lors de sa désintégration, et donc de révéler ou «tracer» les différentes phases du processus dynamique biochimique dans lequel il est engagé.

Dès cette découverte, les applications médicales des radioéléments ont été envisagées aux États-Unis. En 1936, le phosphore radioactif 32 était utilisé comme agent thérapeutique de la leucémie. Quelques années plus tard, l’iode radioactif 131 commençait à être utilisé pour l’étude du fonctionnement de la thyroïde, et servit dès 1940 à traiter certains cas d’hyperthyroïdie.

Ainsi la médecine nucléaire se définit comme le regroupement des applications des substances radioactives en sources non scellées, au diagnostic, à la thérapie et à la recherche médicale.

L’activité diagnostique s’exerce dans l’imagerie fonctionnelle des organes et dans deux domaines où l’image est absente: l’exploration d’une fonction physiologique dont le radioélément est le traceur et les dosages radio-immunologiques donnant une mesure quantitative in vitro de substances présentes dans le sérum ou d’autres compartiments physiologiques.

L’activité thérapeutique utilise l’effet de destruction cellulaire produit par le radioélément, qu’il soit incorporé dans la chaîne métabolique (radiothérapie métabolique) ou injecté à proximité du processus pathologique (radiothérapie interstitielle).

La recherche médicale bénéficie des avancées technologiques, par électronique et informatique interposées, conduisant à de nouvelles procédures de détection et d’analyse de la distribution des radioéléments captés par les organes, et aussi des progrès de la radiochimie dans la production de nouvelles molécules marquées, spécifiques d’une cible ou d’une fonction déterminées.

1. L’imagerie fonctionnelle dans le diagnostic médical

À la fin des années cinquante, la médecine nucléaire reçut une impulsion nouvelle lorsque H. O. Anger, à Berkeley, construisit la première caméra à scintillations. Mieux que le simple comptage des rayonnements émis par le radioélément capté par l’organe, ce dispositif permettait d’en reproduire la distribution spatiale simultanément en tout point de la région étudiée. Il devenait possible de suivre l’évolution de la radioactivité au niveau des différentes régions de l’organe, au lieu d’avoir seulement l’évolution globale: l’imagerie scintigraphique dynamique était née.

La caméra à scintillation est maintenant couplée à un ordinateur où l’image scintigraphique est numérisée. Des manipulations informatiques simples permettent d’améliorer la visibilité des structures, d’obtenir une information quantitative régionale de la distribution du traceur radioactif, et d’analyser une séquence d’images. Ce couplage informatique a permis l’émergence de la tomoscintigraphie , donnant, comme en tomodensitométrie X, des coupes transversales reconstruites à partir de données numériques des projections planes multiples, réalisées ici pendant la rotation de la caméra à scintillations autour de l’organe. Par rapport à la scintigraphie plane, la tomoscintigraphie évite le problème des superpositions et améliore la détection et la localisation spatiale des anomalies de distribution du radiotraceur. Une modalité particulière de la tomoscintigraphie est la tomographie par émission de positrons , fondée sur la détection des rayonnements 塚 d’annihilation des positrons émis dans la désintégration de certains radio-isotopes. Malgré un potentiel d’applications cliniques important, cette technique reste confinée à quelques centres d’évaluation et de recherche en raison du coût de l’équipement (cyclotron de production de radioéléments à courte période, et caméra à positrons).

Les résultats obtenus sont présentés d’après les sites anatomiques au niveau desquels ils ont été obtenus.

Système nerveux central

La médecine nucléaire apporte ici des informations irremplaçables sur les fonctions métabolique et perfusionnelle du cerveau, ainsi que sur les mouvements du liquide céphalo-rachidien. En tomographie par émission de positrons, il est en particulier courant de mesurer l’utilisation cérébrale régionale du glucose à partir du fluorodésoxyglucose marqué par le fluor 18, dont l’absence de métabolisation après phosphorylation entraîne sa rétention au niveau des cellules cérébrales qui l’ont capté. Une distribution régionale très particulière est observée dans les états précliniques de la maladie de Huntington et les différents types de démence: maladie d’Alzheimer ou d’origine ischémique. Cette technique permet également d’étudier la distribution spatiale des neurorécepteurs à partir de radiotraceurs spécifiques, et constitue un outil très original dans l’exploration des fonctions physiologiques et des états pathologiques cérébraux, ainsi que des modes d’action des médicaments.

En tomoscintigraphie, la perfusion cérébrale régionale peut être quantifiée après injection de traceurs liposolubles s’accumulant proportionnellement au débit sanguin régional. Dans le cas d’accident vasculaire cérébral, l’hypofixation initiale de l’iodo-amphétamine marquée à l’iode 123, reflet de la diminution du débit sanguin, peut se modifier au cours du temps en fonction de l’activité métabolique cellulaire persistante. Cette évolution apporte un élément pronostique sur les possibilités de récupération fonctionnelle. Avec le nouveau traceur lipophilique HMPAO marqué au technétium 99m, la distribution initiale ne se modifie pas, et rend possible, à distance de l’injection, l’analyse des perturbations transitoires de la perfusion cérébrale lors de crise d’épilepsie, stimulation corticale, ou effet pharmaceutique.

La cisternographie radio-isotopique étudie les mouvements du liquide céphalo-rachidien le long du névraxe. Injecté par voie lombaire, le DTPA d’indium 111 se distribue dans les espaces sous-arachnoïdiens. Les images scintigraphiques obtenues sous projections multiples permettent de suivre le cheminement de la radioactivité. Une entrée et une persistance du traceur dans les ventricules latéraux sont des signes diagnostiques essentiels de l’hydrocéphalie à pression normale.

Système cardio-vasculaire

La simple injection intraveineuse d’un radiotraceur permet d’aborder des domaines aussi différents que ceux de la perfusion, du métabolisme et de la viabilité cellulaire myocardiques, de l’hémodynamique cardiaque et vasculaire, et de la maladie thrombo-embolique.

Perfusion, métabolisme et viabilité cellulaire myocardiques

Un radiotraceur très utilisé est le thallium 201 qui joue vis-à-vis de la cellule un rôle très voisin de celui du potassium: capté par toute cellule en activité, sa distribution au sein des organes est le reflet du débit sanguin régional et de la viabilité des cellules irriguées. Un défaut de fixation du thallium traduit donc une hypoperfusion, une ischémie ou une lésion cicatricielle de l’organe. La mise en évidence des sténoses coronariennes peut être obtenue en créant une disparité dans les débits sanguins locaux, en particulier sous l’effort. La scintigraphie montre alors une hypofixation transitoire dans le territoire vasculaire de l’artère sténosée. Examen de référence dans l’appréciation de l’étendue d’un infarctus myocardique connu, la tomoscintigraphie myocardique contribue au diagnostic non invasif des sténoses coronariennes lorsque l’épreuve d’effort est douteuse. Après la coronarographie radiologique qui montre la topographie des sténoses, elle permet de caractériser la sévérité fonctionnelle des lésions par la mesure directe de leur retentissement sur la perfusion myocardique, et va guider le choix thérapeutique.

La scintigraphie myocardique reçoit une impulsion nouvelle avec l’arrivée d’un nouveau groupe de traceurs, les isonitriles marqués au technétium 99m, plus facilement disponibles et conduisant à des images de meilleure qualité.

La tomographie par émission de positrons offre l’intéressante possibilité de l’analyse comparée de la perfusion et du métabolisme régional myocardiques, par injection successive d’ammoniac marqué par l’azote 13, de fluorodésoxyglucose marqué au fluor 18 et d’acides gras marqués au carbone 11. Un défaut de perfusion concordant avec un défaut d’utilisation des acides gras et un excès d’utilisation du glucose traduit une ischémie sans atteinte irréversible de la viabilité cellulaire, et précise le type de thérapeutique à envisager.

Hémodynamique cardio-vasculaire

Les explorations sont réalisées à partir de traceurs dont la distribution reste strictement intravasculaire: sérumalbumine ou hématies marquées au technétium 99m. Le caractère périphérique de l’injection, le petit volume injecté, l’absence d’action cardio-vasculaire du traceur, la répétition possible des examens permettent d’étudier l’hémodynamique cardio-vasculaire de façon non invasive. Une prise de vues cadencée, à raison d’une image par seconde, permet essentiellement l’analyse de la vascularisation des gros troncs artériels (carotidien, sylvien, aortique, iliaque) et l’étude du transit de l’embol radioactif dans les cavités cardiaques.

La scintigraphie des cavités cardiaques est assurée par une prise d’images numérisées à cadence élevée pendant le passage de l’embol dans les cavités cardiaques, ou après dilution du traceur dans l’ensemble du secteur vasculaire. L’échantillonnage temporel est suffisamment court pour que la séquence d’images puisse montrer le mouvement des cavités. Le nombre des rayons 塚 détectés en projection des ventricules étant proportionnel à leur volume, l’étude de sa variation au cours du cycle cardiaque conduit à la mesure des paramètres représentatifs de la fonction pompe cardiaque globale, à la visualisation et à la quantification des anomalies segmentaires de contraction ventriculaire. Réalisé au repos, cet examen permet d’assurer le choix thérapeutique chez des patients ayant présenté un infarctus myocardique ou de surveiller la fonction cardiaque lors d’un traitement par adriamycine. Sous l’effort ou après intervention pharmacologique, la scintigraphie des cavités cardiaques peut montrer la désadaptation fonctionnelle d’origine ischémique chez les patients coronariens, et fournit des indications essentielles sur le retentissement de la surcharge ventriculaire entraînée par une incompétence valvulaire.

La maladie thrombo-embolique

L’exploration de l’arbre vasculaire à la recherche de thromboses est réalisée suivant deux approches, l’une indirecte, où les marqueurs vasculaires montrent le ralentissement ou l’interruption du flux sanguin, l’autre directe, où le marqueur est spécifique du processus de coagulation: plaquettes marquées à l’indium 111, anticorps antifibrine marqués au technétium 99m. Les microsphères d’albumine marquées au technétium 99m servent à la réalisation des scintigraphies de perfusion pulmonaire, et les défauts de fixation signent la présence d’embolie.

Explorations endocrinologiques

L’une des premières applications médicales des radio-isotopes utilisait de l’iode 131 pour l’exploration fonctionnelle et la radiothérapie de diverses affections de la glande thyroïde. Les modalités d’exploration ont changé, mais ce domaine d’application reste important. L’imagerie fonctionnelle en endocrinologie concerne également les glandes parathyroïdes et les glandes surrénales.

La glande thyroïde

L’iode radioactif 131 ou 123 apporté dans le plasma est capté par les cellules thyroïdiennes qui l’intègrent dans la synthèse des hormones. Le pertechnétate-technétium 99m est capté mais non incorporé dans cette synthèse. Plus facilement disponible que les isotopes de l’iode, il permet une imagerie souvent suffisante. La distribution du traceur est spécifique du contexte pathologique: hypertrophie plus ou moins importante de la glande avec une distribution homogène dans la maladie de Basedow, nodules uniques ou multiples fixant exagérément le traceur et traduisant un hyperfonctionnement glandulaire local qui échappe à la régulation hypophysothyroïdienne, nodules hypofixants correspondant à des adénomes, kystes, foyers localisés de thyroïdite ou bien à des cancers.

Les glandes parathyroïdes

La mise en évidence du tissu parathyroïdien hyperfonctionnel s’effectue à partir de deux traceurs injectés successivement: le thallium 201, qui se fixe sur les parenchymes thyroïdien et parathyroïdien, puis le pertechnétatetechnétium 99m capté par le seul tissu thyroïdien. La soustraction des images peut aider à la visualisation du seul tissu parathyroïdien hyperfonctionnel.

Les glandes surrénales

L’hyperfonctionnement corticosurrénalien est visualisé à partir d’un analogue du cholestérol marqué à l’iode 131 entrant dans la synthèse des hormones corticosurrénaliennes. Le diagnostic d’une tumeur hyperfonctionnelle échappant à la régulation hypophysosurrénalienne est amélioré par une épreuve de freinage à la dexaméthasone: la diminution de la production d’ACTH déprime la stimulation du tissu normal, mais reste sans effet sur la tumeur. Le secteur médullosurrénalien est exploré par la méta-iodobenzylguanidine (MIBG), molécule proche de la noradrénaline et marquée à l’iode 131 ou 123. Elle s’accumule électivement dans les vésicules de stockage des catécholamines de la médullosurrénale, des ganglions sympathiques, et des tumeurs qui en dérivent.

Tube digestif

La sensibilité de détection et la possibilité d’observation sur de longues durées confèrent à la scintigraphie des avantages certains dans l’étude des anomalies de la motricité œsophagienne et gastrique. Le traceur est administré par voie orale sous forme de sulfocolloïdes marqués au technétium 99m. Une prise de vues séquentielles numérisées permet de suivre et de quantifier le transit œsophagien. Cet examen apparaît utile dans la recherche de troubles moteurs intermittents, dans le diagnostic de la maladie des spasmes diffus, dans la surveillance du traitement de l’achalasie, et dans la recherche et la quantification d’un reflux gastro-œsophagien. La vidange gastrique s’étudie à partir d’aliments liquides ou solides marqués, et peut être quantifiée par le temps au bout duquel la radioactivité gastrique a diminué de moitié.

Le difficile problème de la localisation spatiale d’un saignement digestif peut être également abordé par scintigraphie. Le traceur, constitué par des sulfocolloïdes ou des globules rouges marqués par le technétium 99m, est injecté par voie intraveineuse. Cette méthode peut détecter de faibles saignements, mais les échecs sont nombreux car les saignements digestifs sont fréquemment intermittents et peuvent être absents au moment de l’examen.

Foie et voies biliaires

La tomodensitométrie et l’imagerie par résonance magnétique (IRM) sont actuellement les meilleures techniques d’imagerie non invasive dans le diagnostic des lésions focales du foie. La scintigraphie trouve une place de choix dans l’exploration de la fonction hépatobiliaire à partir de l’acide iminodiacétique marqué au technétium 99m. Extrait de la circulation sanguine par les hépatocytes, le traceur est concentré dans la bile et s’écoule dans l’intestin. La vidange vésiculaire peut être visualisée et quantifiée après administration d’un repas de Boyden. Les indications de cet examen sont le diagnostic de cholécystite aiguë, la recherche de l’origine d’un ictère, le contrôle d’une cholécystectomie ou d’une anastomose biliodigestive, la mise en évidence d’un reflux duodénogastrique, la recherche d’une fistule biliaire et la surveillance d’un transplant hépatique.

Rein et voies urinaires

L’imagerie scintigraphique du rein et des voies urinaires apporte des informations fonctionnelles qui s’intègrent dans la stratégie générale du diagnostic des affections de ces organes. Citons en particulier la mesure de la fonction séparée relative de chaque rein, la détection et la surveillance de reflux vésico-urétéral, la surveillance d’un transplant rénal.

De nombreux radiopharmaceutiques sont disponibles pour ces explorations. Certains, comme le DTPA marqué au technétium 99m, sont éliminés du rein uniquement par filtration glomérulaire. D’autres, comme l’hippuran marqué à l’iode 123 ou le nouveau traceur MAG marqué au technétium 99m, subissent une filtration glomérulaire et une sécrétion tubulaire. Enfin, le DMSA marqué au technétium 99m se fixe sur les cellules des tubes rénaux. La recherche d’un reflux vésico-urétéral s’effectue après remplissage de la vessie par n’importe quel traceur marqué au technétium 99m.

Système osseux

Contrairement à l’image radiologique qui traduit le contenu minéral osseux, l’image scintigraphique montre l’ostéogenèse. Les radiopharmaceutiques à tropisme osseux sont des composés phosphatés marqués par le technétium 99m, le plus utilisé étant le diphosphonate.

La scintigraphie osseuse est extrêmement sensible pour mettre en évidence des foyers de renouvellement osseux accéléré ou diminué. Mais ces images ne sont pas spécifiques d’un processus pathologique donné. Les indications cliniques concernent la recherche et la surveillance de métastases osseuses, l’exploration des traumatismes osseux sans signes radiologiques, les troubles de la vascularisation osseuse (nécrose de la tête fémorale, infarctus, algodystrophie), les foyers d’infection, la pathologie articulaire, les troubles du métabolisme et la surveillance des néo-formations osseuses.

Foyers inflammatoires et infectieux

La recherche de foyers inflammatoires et infectieux peut être réalisée à partir de globules blancs marqués à l’indium 111 ou du citrate de gallium 67.

Détection des tumeurs cancéreuses

Les marqueurs utilisés en imagerie fonctionnelle peuvent révéler la présence d’une lésion cancéreuse, mais le plus souvent de façon non spécifique: hypofixation du marqueur thyroïdien, hyperfixation du marqueur osseux. Un des axes importants du développement de la médecine nucléaire est la production de marqueurs spécifiques d’un processus pathologique déterminé, en particulier cancéreux, dans le but non seulement de le révéler, mais aussi de le traiter. Les anticorps monoclonaux, spécifiques de cibles antigéniques, constituent un exemple très prometteur de vecteurs de radio-isotopes à tropisme sélectif. L’immunoscintigraphie est le nom de ce domaine particulier de l’imagerie fonctionnelle. Cependant, les difficultés d’utilisation des anticorps monoclonaux dans la détection des tumeurs cancéreuses sont nombreuses. Le premier problème concerne la spécificité de l’anticorps lui-même: trop spécifique, il peut ne pas correspondre aux sites antigéniques de la tumeur recherchée dont la nature exacte n’est pas connue a priori. Moins spécifique, lorsqu’il s’agit par exemple d’un mélange d’anticorps, il va donner lieu à des fixations sur les tissus non cancéreux et gêner la détection de la tumeur. Un autre problème concerne l’immunogénicité qui se développe contre l’anticorps injecté, limitant ainsi l’utilisation ultérieure du même anticorps. Ces difficultés mises à part, l’immunoscintigraphie trouve à ce jour ses applications dans le diagnostic et la surveillance des cancers colorectaux, ovariens, du sein et dans le bilan d’extension des mélanomes.

2. Les investigations cliniques sans imagerie

Les investigations cliniques qui n’utilisent pas l’image scintigraphique regroupent les explorations fonctionnelles des organes après administration d’une faible quantité d’un traceur radioactif puis comptage de la radioactivité de l’organe lui-même ou de prélèvements de sang, d’urine ou de fèces, ainsi que les mesures par radio-immunologie de substances biologiques présentes dans le sang, ou d’autres fluides corporels.

Explorations fonctionnelles

Les techniques de radiomarquage permettent d’explorer de nombreux phénomènes physiologiques, comme la captation de l’iode par la thyroïde, l’absorption intestinale de la vitamine B 12, la survie et la séquestration des cellules sanguines, la mesure des volumes sanguins globulaire ou plasmatique, la cinétique du fer, du calcium, etc.

Dosages radio-immunologiques

S. Berson et R. Yalow décrivirent en 1960 le principe du dosage par radio-immunologie, et cette découverte fut couronnée en 1977 par l’attribution à R. Yalow du prix Nobel de médecine. Cette technique de dosage est à la fois extrêmement sensible puisqu’elle est capable de détecter des substances dont la concentration est de l’ordre de 10 pmol/1, et spécifique car elle utilise des anticorps produits sélectivement contre la substance à doser. Le principe repose sur la compétition vis-à-vis de l’anticorps, de la substance à doser et d’une quantité connue de la même substance radiomarquée. Une quantité croissante de substance à doser diminue la proportion de la substance radiomarquée qui peut se fixer sur l’anticorps. Le taux de la substance est déterminé à partir d’une courbe d’étalonnage représentant le rapport de la radioactivité des parties libre et liée à l’anticorps en fonction de la concentration de la substance. L’endocrinologie a particulièrement bénéficié de cette découverte. De nombreuses autres substances sanguines non hormonales, en particulier exogènes comme certains médicaments, peuvent être également dosées par radio-immunologie.

3. Applications thérapeutiques

Les applications thérapeutiques de la médecine nucléaire portent exclusivement sur l’utilisation des radioéléments en sources non scellées. Sont donc exclues de ce domaine thérapeutique la cobalthérapie et la curithérapie, dans lesquelles le radioélément est enfermé dans une enveloppe étanche. L’action thérapeutique est liée à l’effet destructeur du rayonnement émis par le radioélément sur les cellules qui l’ont concentré. Le radioélément peut être intégré dans la chaîne métabolique du processus pathologique à traiter. Un exemple historique et toujours très actuel de cette radiothérapie métabolique est l’utilisation de l’iode 131 dans le traitement des affections thyroïdiennes: hyperthyroïdies, cancers thyroïdiens. Le phosphore 32 permet de traiter la polyglobulie primitive, ou maladie de Vaquez. Injecté par voie veineuse sous forme de phosphate de sodium, le phosphore radioactif se localise au niveau des noyaux cellulaires des cellules souches de la moelle osseuse responsables d’une production exagérée de globules rouges.

La spécificité de vecteurs de radio-isotopes comme les anticorps monoclonaux élargit le champ des applications curatives de la médecine nucléaire. Des essais prometteurs ont été réalisés chez des patients porteurs d’hépatome ou de maladie de Hodgkin, à partir d’un anticorps antiferritine, protéine associée aux lésions tumorales de ces affections. Le traitement du mélanome disséminé pourrait également bénéficier de ce type de radiothérapie.

En radiothérapie interstitielle, le radioélément n’est pas spécifique, mais injecté à proximité du processus pathologique. La thérapie articulaire est un exemple très représentatif. Dans les cas d’arthrite inflammatoire rebelle, l’injection intra-articulaire d’un radio-isotope comme l’yttrium 90, le rhénium 186 ou l’erbium 169, choisis en raison de la faible pénétration tissulaire du rayonnement 廓 émis, permet l’irradiation très localisée de la synoviale et des cartilages articulaires.

4. Recherche médicale

La recherche médicale liée à l’utilisation des radioéléments dépend de l’avancée simultanée des connaissances dans trois disciplines distinctes: la physique appliquée pour l’instrumentation, les mathématiques appliquées pour les procédés d’analyse et la chimie pour les radiopharmaceutiques.

Développement de l’instrumentation

La caméra à scintillations tournante est l’équipement le plus répandu dans les services de médecine nucléaire, car elle offre de nombreuses possibilités: imagerie de projection statique ou dynamique, balayage du corps entier, tomoscintigraphie. Un des derniers développements consiste à faire gérer par un ordinateur toutes les fonctions propres de la tête détectrice: corrections d’énergie et d’uniformité, sélection d’énergie, commande du mouvement de rotation. La résolution spatiale est améliorée par l’utilisation de trajectoires de rotation suivant au plus près les contours de la tête ou du corps du patient. Les meilleurs équipements donnent actuellement des résolutions inférieures à 1,2 cm.

L’observation tomographique de phénomènes physiologiques rapides impose l’utilisation de détecteurs statiques ou faiblement mobiles, entourant l’organe à étudier. Les tomographes à émission de positrons remplissent ces conditions. Pour les radio-isotopes émetteurs de rayonnement 塚, des caméras à scintillations constituées par des réseaux de cristaux entourant l’organe permettent d’obtenir simultanément plusieurs coupes en des temps inférieurs à 5 minutes.

La miniaturisation des détecteurs de rayonnements se poursuit, et permet de réaliser des systèmes de détection peu encombrants, portables, pour la mesure de paramètres fonctionnels pendant les activités journalières des patients.

Développement des processus d’analyse de la distribution des radioéléments

Le rôle des mathématiques appliquées dans l’analyse de la distribution des radio-isotopes au sein des organes est considérable. La mise au point des logiciels de reconstruction tomographique en est un exemple. Le traitement mathématique des images numérisées obtenues en projection permet d’améliorer la visibilité des structures par le retrait des éléments indésirables, l’adaptation du contraste de l’image et l’élimination du bruit.

Un des apports essentiels de la scintigraphie est de réaliser une acquisition séquentielle et rapide d’images, pour suivre de façon dynamique la variation temporelle d’une information physiologique comme le mouvement d’un organe ou le métabolisme d’un composé marqué. Dans ce type d’images, le traitement mathématique va pallier les limites de l’observateur qui ne peut intégrer dans le temps et dans l’espace la multitude des informations présentes dans l’ensemble de la série. L’analyse de Fourier ou l’analyse factorielle de la variation temporelle du contenu numérique de chaque élément de l’image conduisent à la formation d’images paramétriques où l’essentiel de l’information physiopathologique est restitué.

Le traitement mathématique des images numérisées permet enfin une quantification du phénomène observé. L’automatisme de l’analyse diminue la subjectivité présente dans la seule interprétation visuelle, et donne une gradation continue dans la définition de l’anomalie qui permet de dépasser le classement dichotomique entre normal et anormal.

Développement des radiopharmaceutiques

La mise au point de générateurs de radio-isotopes reposant sur la production par filiation radioactive des radioéléments servant de marqueurs à de nombreux composés à tropisme sélectif a permis une extension rapide des explorations de la médecine nucléaire. Le technétium 99m constitue le radioélément le plus utilisé dans les services de médecine nucléaire. Il émet un rayonnement 塚 d’énergie adaptée aux détecteurs à scintillation, et sa période physique de 6 heures autorise les différentes explorations sans irradiation inutilement prolongée du patient. Les efforts des radiochimistes s’appliquent à l’approfondissement de la connaissance de la chimie du technétium pour la préparation de vecteurs de cet élément, spécifiques d’une fonction.

Dans les centres pratiquant la tomographie par émission de positrons, les radiochimistes sont confrontés au double problème de préparation de vecteurs spécifiques et de la mise au point de techniques de marquage extrêmement rapides en raison de la très courte durée de vie des radio-isotopes produits par le cyclotron.

Ainsi l’avenir de la médecine nucléaire et son impact sur la recherche médicale sont liés à la production de nouvelles molécules spécifiques des atteintes physiopathologiques des organes. Cette approche fonctionnelle constitue un outil diagnostic puissant, distinct de l’évaluation des seuls changements structuraux qui peuvent être appréciés par d’autres méthodes diagnostiques. Les difficultés méthodologiques liées à l’utilisation de nouveaux traceurs ne peuvent être résolues que par un effort parallèle de développement de l’instrumentation et des méthodes mathématiques d’analyse.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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